Je te vois ! [Aerynn ; Orween]

Sacré Piaf ! Il avait choisi la jolie demoiselle sans lui demander son avis, quel manque de courtoisie ! Lui, il se payait un espèce de machin moche multicolore avec un arc. Beurk. En plus, il avait l'air fort. Enfin... c'était sûrement très relatif vu qu'Aerynn avait ce sentiment avec les trois quart des individus qu'il avait rencontré jusque là. Cependant, en un sens, il était content de ne pas être contre la fille aux cheveux bizarre. Ca faisait un petit bout de temps qu'ils les espionnaient au loin, attendant de voir une opportunité soit de les asservir, soit de les massacrer. Lorsqu'ils les avaient vu se séparer, le Piaf avait sauté sur l'occasion pour se casser vers la fille qui avait utilisé ses cheveux pour s'échapper. Ce genre de truc ne l'inspirait pas et il préférait largement se contenter d'esquiver quelques flèches inoffensives.

S'il pouvait ne pas se battre ça serait bien aussi. S'il restait à distance en tant qu'observateur en attendant que le Piaf en ait terminé avec l'autre puis il sortirait de sa cachette pour un magnifique deux contre un qui serait forcément à leur avantage ! Comment ça il refilait tout le boulot au Piaf ? Mais bien sûr ! C'est la base de la survie ! Il n'aurait jamais tenu aussi longtemps dans le domaine infernal sans user de ce genre de stratégie ! De toute façon, le combat n'était pas pour lui. Il préférait l'assassinat pur et simple : un bon couteau dans la gorge vaudra toujours mieux que trente minuete de face à face avec un adversaire ! Mais bon, les ordres étaient les ordres et il devait subir pour le moment. Comme tous les moments jusque là d'ailleurs, mais il n'en tenait pas compte : le passé c'est le passé.

Il resta donc là, tapis dans l'ombre des bosquets, prêt à sauter sur la moindre ouverture sans vraiment avoir l'intention de le faire. En fait, il cherchait juste un moyen de se la couler douce en espérant ne pas se faire remarquer. Après tout, le grand dada blanc et violet semblait assez à l'aise malgré sa carrure dans cette forêt touffue.

Il y avait quelque chose de bizarre dans son attitude. Loin de sembler se soucier de sa propre position, le poney avait davantage l'air de chercher quelque chose au loin. Il avait dit un mot en un langage inconnu puis avait commencé à bouger dans une direction qui semblait bien familière à Aerynn. N'était-ce pas par là que la jeune femme et le Piaf étaient partis quelques instants auparavant ? Avaient ils un moyen de garder contact malgré la distance ou était-ce du à l'instinct animal ? La proximité des bruits de sabots ne lui indiquait rien de bon. Et il eut apparemment raison. Trois traits de mort foncèrent dans sa direction et ce fut davantage par réflexe que par attention qu'il les esquiva. Ca aurait pu être des cacahuètes ou un marteau, le résultat eut été le même. Autant les compétences d'attaque d'Aerynn étaient très inférieures à la plupart de ses congénères, autant ses capacités de survie et de fuite valaient tous les démons des enfers. Ou presque. En tout cas, ce n'était pas une attaque simple qui viendrait à bout du roi de la survie. Posant une main de ses dagues cachée, le démonoïde s'extirpa de sa cachette de fortune. Levant l'autre main en signe pacifiste, il s'adressa à la bestiole avec un ton trop léger pour la situation.

"Allons, allons, calme toi, je ne te veux rien de mal ! Il ne faut pas tirer sur tout le monde, comme ça, alors qu'ils font pipi dans les sous-bois ! Un jour tu feras du mal à une innocente personne et alors tu auras des remords et après tu t'en voudras toute ta vie ! Ca ne serais pas très bien, n'est-ce pas ? Alors il faut baisser les armes et discuter un peu avec les gens que le destin à placé sur ta route. Après tout, ça serait bête que l'un de nous deux meure sans avoir de réel motif, hein ? On se comprends. Bref, t'fais quoi dans la vie ? Tes passions, tes passe-temps, les amours, les copains, tout ça, tout ça... Vas-y je note !"

Il essayait de gagner du temps. Il était sûr que le Piaf pouvait gagner face à la demoiselle. Il attendait juste de voir la réaction du centaure avant de lâcher sa dague. Au cas où il se montrait hostile, cette dernière serait son seul atout matériel. Bien sûr, il ne comptait pas les atouts que l'enfer Noir lui avait confié...

Zut, il était moins bête qu'il en avait l'air. Ou moins commode qu'il ne l'espérait, tout dépendait du point de vue. Toujours était-il que le centaure semblait réticent à dialoguer avec le démonoïde. Une nouvelle salve de flèches accueillit la longue tirade du garçon qui ne mit pas une seconde à réagir. A peine eut-il aperçut les pointes qu'il dégaina sa dague afin d'exterminer la gène. Effectuant un salto arrière pour éviter les flèches au sol, il donna un coup de dague dans une des flèches adjacentes en bloquant la dernière entre ces dents. Quoi qu'il tente, ce n'était pas avec un arc qu'il parviendrait à mettre en pièce le petit Aerynn, aussi faible soit-il. Tant qu'il ignorerait son point fort, il serait incapable de trouver ses faiblesses.

Un bruit sourd fit alors trembler le sol terreux, déstabilisant le démonoïde à la réception. Ce dernier faillit se retrouver étalé sur le sol mais son habituelle vivacité lui permit de s'appuyer sur ses membres pour éviter de se planter la flèche qu'il tenait toujours dans le palais. Désormais dans une position suggestive, il cracha le projectile avant de se redresser souplement. Face à la détermination de l'animal, il fallait qu'il trouve un nouveau procédé pour le ralentir. Sa dague ne servirait pas forcément à grand chose vu que son objectif était d'essayer de le recruter et comme le dialogue semblait actuellement fermé, il ne lui restait qu'une mince solution.

Ni une ni deux, Aerynn se mit à sprinter en direction du centaure avant de sauter sur ce qu'il voulait être son dos. Ou son encolure pour les pointilleux. Il n'était jamais monté à cheval, il ne savait pas manier une telle créature et s'attendait vraiment au pire. Mais le pire vallait mieux que laisser la bête s'échapper sans rien faire. Quoi qu'il se passât, Aerynn serra les dents et s'apprêta à morfler comme il en avait tant l'habitude. Seule son ignorance l'effrayait davantage qu'à l'accoutumée.